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MessageSujet: Asphyxie Asphyxie EmptyMer 2 Mai - 15:56
Elijah

“ If you have to leave, I wish that you would just leave
Your presence still lingers here and it won't leave me alone”






Elijah Myzzrim



121 ans doll sculpteur de marbre Argos élémentaire

Peau : Blanche Taille : 5’7 Corpulence : Mince Cheveux :  Blancs, longs, souvent tressés Yeux : Bleus Forme non-humaine : Aucune Signe(s) distinctif(s) : Il porte souvent des kimonos et il a des bandages qui couvrent ses bras et ses mains.

∞ Caractère

Elijah est doux, calme, généralement gentil, mais beaucoup le qualifieront de froid malgré ses côtés plus chaleureux. Il n’a aucun problème à venir en aide aux autres, étant un homme excessivement patient et assez généreux. Il peut passer des heures à écouter autrui et conseiller, au besoin. Il aime les endroits silencieux, les livres, la musique douce, la méditation, le thé, mais la compagnie des autres, sans lui être nécessaire, ne le dérange pas. Comme c’est un garçon très occupé, cependant, il n’a que peu d’amitiés sincères. Elijah, en plus d’être calme, est très sérieux. Il n’a… absolument aucun sens de l’humour. Il ne comprend d’ailleurs pas le sarcasme. Cette partie plus froide de lui se traduit très bien lorsqu’on comprend sa relation avec les plaisirs charnels : il n’a aucune difficulté à en parler et il est très ouvert à l’idée d’expliquer ses propres intérêts, cependant, toutes blagues ou commentaires inappropriés liés à ce passe-temps reçoivent un regard désapprobateur de sa part. De plus, il déteste se faire draguer de façon qu’il qualifie de vulgaire, alors qu’il n’a aucun problème à multiplier les amants. Le seul humour qui peut lui apporter un rire est celui qui se compose de jeux de mots. Elijah a un terrible ego en ce qui concerne son art. C’est peut-être là son plus grand défaut. Il tend à vanter les mérites de son talent et n’hésite pas à refuser une commission si elle ne lui plaît pas. Il critique même le plus débutant des artistes pour montrer à quel point il s’y connaît en la matière. Il est presque impossible de travailler avec lui.

∞ Histoire

Il était né avant son temps, et on l’avait puni de sa naissance prématurée par un parasite qui lui grugeait les poumons. L’insecte restait tapis dans l’ombre du corps, puis, parfois, il attaquait. Son venin repoussait l’oxygène, ne laissant qu’une trainée de sang sortir là où il y aurait dû y avoir de l’air. Plus que la douleur, c’était la peur qui le torturait. La peur qu’une crise recommence, puis, lorsque la souffrance devenait mortelle, la peur de ne pas y survivre. Vivre avec tant de nervosité sous la peau, ce n’était pas vivre, c’était survivre. Il était une proie constante de son propre corps. On n’échappe pas au prédateur quand celui-ci, c’est la prison même où notre esprit est enfermé.

Elijah était malade.

Ce n’était même pas un état éphémère : la maladie était une partie même de sa chair. Si on tentait de l’abattre, il tombait aussi, alors qu’à tous les jours, elle se plaisait à le martyriser!

Elijah avait ainsi été malade depuis… depuis avant même qu’il ait pu se souvenir. Peut-être même avant qu’il soit né, oui. Elijah avait toujours été malade. Et il lui aura semblé que ce fut le trait dominant de toute son enfance. La maladie. On s’occupait plus d’elle qu’on s’occupait de lui.

À ses deux ans, on tenta de purifier le fléau. Pendant quelques semaines, il ne toussait plus, mais lorsqu’il redevint vilain, ce n’était que plus puissant.

 - Daddy… I want to pet the dog…
- Son, your lungs are too sensitive. It could be dangerous.

À ses quatre ans, on lui promit un remède à son désespoir – un sort blanc rare, qui, disait-on, tuait les maladies qui naissaient avec les enfants. Généralement un succès. Généralement. Quand on dit généralement, c’est qu’il y a des exceptions. Elijah était l’exception.

- Mommy, can I go outside?
- No, Eli. You know… there are allergens, outside... It’s too dangerous.  

À ses six ans, on se tourna à la médecine traditionnelle : des bonnes gélules! Mais, rapidement, Elijah apprit que le médicament n’était là que pour affaiblir la douleur des crises. Mais, rapidement, les crises comprirent que la défense ennemie était abattable. Les gélules devinrent complètement inefficaces.  

- Daddy, can I go play with the other kids?
- Eli…. We talked about this… You can’t do physical activities… you will have an attack.

Son huitième anniversaire, il le passa à l’infirmerie privée des Myzzrim. Comme son septième anniversaire avant. Son Noël. Sa nouvelle année. Pâques. Parfois, il oubliait les couleurs de sa chambre officielle. Sa chambre officieuse, c’était le bureau du médecin.

- Can I at least watch them..?
- No. You have to stay close to us. If you have an attack and we’re not around to protect you…

Ses parents le chérissaient. Ce n’était pas de l’amour. S’ils l’avaient aimé, ils auraient accepté que la maladie d’Elijah était chronique, incurable, et ils lui auraient donné une vie au lieu de la lui promettre lorsqu’il serait guéri.

Adolescent, Elijah n’avait pas d’amis. Au total, il était sorti cinq fois du manoir. Trois fois ayant été pour des examens médicaux chez les Fergail. Deux fois ayant été avant que la maladie lui ferme les portes de la liberté. Il n’avait jamais parlé à personne qu’à ses parents, ses médecins, quelques infirmiers, trois servants. Quant à ce qui est de parler à ses cousins… C’était plutôt les surprendre qui s’entretenaient à son sujet de l’autre côté de la porte.

Son meilleur ami, c’était le parasite. Au moins, il avait des conversations quotidiennes avec lui. Ce n’était peut-être que toux, sang et asthme. C’était tout de même plus long, plus riche que ce qui n’avait été échangé avec ses comparses. Et il ne le laissait jamais seul. Jamais.

Elijah était malade. Seul. Angoissé. Il détestait vivre, et pourtant, son existence entière se résumait à tenter de trouver une façon de le faire survivre plus longtemps.

Ce fut le quatorze octobre 99 892 que Elijah connut le bonheur pour la première fois. Un vrai bonheur. Pas un bonheur névrosé de terreur comme étaient les rares lectures qu’il avait avec ses parents, son étude de la magie élémentaire, ou les brèves promenades dans les jardins Myzzrim… Un vrai bonheur… Simple. Léger.

Il était déjà vint-et-une heure quand Elijah vit, du haut de la fenêtre de cette chambre qui l’hébergeait si rarement, une lumière orange pourfendre les ténèbres. Se levant, il réprima la sécheresse qui se faisait dangereuse dans ses poumons, et alla observer la source d’une telle beauté. Il y eut une autre lumière, bleue. Puis une jaune. Une rouge. Il finit par reconnaître que c’étaient un spectacle pyrotechnique – il en avait lu, dans ses livres, mais jamais vu auparavant. C’était explosif. Terrifiant. Magnifique. Vivant. Son seul regret, c’était peut-être qu’ils soient aussi éphémères…

Il voulait s’approcher. Il voulait sortir. Jamais de sa vie n’avait-il autant voulu s’évader. Et il y avait quelque chose, dehors. Il y avait la vie. Puis, si la crise le suivait, ça serait peut-être la dernière, et elle serait dans la beauté. Il n’aurait pas à angoisser qu’il y en aurait une prochaine... Dehors. Seul, et pas qu’en esprit. Personne pour l’empêcher d’être enfin libéré de sa souffrance.

Il enfila son manteau et s’éclipsa dans le corridor. Qu’est-ce qu’il faisait? Il n’était jamais sorti du manoir! Un rire heureux s’échappa de ses lèvres. S’il revenait vivant de cette soirée, ses parents allaient être enragés. Leurs visages colériques lui attirèrent un sourire. Il passa personnel et parenté. Il ne fut pas remarqué, parce qu’il n’était pas connu. Il ne fut jamais aussi reconnaissant d’être une wallflower.

Il ouvrit les portes dans un éclat de lumière. Il n’avait pas le droit d’être là. Ça rendait la chose encore plus merveilleuse. Chaque pas qu’il prenait, un autre tonnerre grondait dans une explosion de couleurs. Il sentait l’asthme qui montait dans ses poumons. Peu importe. Ses pas devinrent une course. Son souffle se fit plus court. Mais il était heureux. Il courait! Il savait à peine faire ça, courir. Il lui semblait qu’il allait tomber à chaque élan, pourtant, ses pieds le rattrapaient. C’était merveilleux, oui. Fantastique.

Il arriva à l’orée du festival. Il y avait plus de gens qu’il n’en avait jamais vu dans sa misérable enfance. Les gens… ils chantaient… ils riaient… Ça ne sentait pas les murs lavés jusqu’à l’usure. Ça ne sentait pas la mort, les médicaments inutiles, les seringues, le sang. Ça sentait la vie.

Mais la crise l’avait effectivement suivi. Rapidement, ses poumons se remplirent de mort. Il commença à tousser violemment, les larmes brouillant son regard.

Pourquoi même ici?  

- Hey, ça va?

Il leva les yeux vers le garçon qui venait de s’adresser à lui dans le dialecte elfique. Elijah comprenait parfaitement cette langue : il ne l’avait cependant que rarement utilisée, et, surtout en moment de panique comme ça, il préféra répondre en angélique.

- N-no..., s’étouffa-t-il.

Le garçon l’aida à s’asseoir. C’était un jeune sylvestre, probablement bourgeois d’après ses vêtements, tout ce qu’il y avait de plus ordinaire.

- J’ai un truc, pour la douleur… ça va t’aider à aller mieux.
- Pills don’t work on me…
- C’est pas des pilules. C’est une petite poudre, regarde…

Il lui ouvrit un pot. C’était une petite boîte brune, décorée. Elijah se rappelle l’avoir trouvée jolie.

À l’intérieur, c’était effectivement une poudre. Ça ressemblait presque à du sucre.

-  Tu perds rien à essayer.
- Y-you’re… you’re giving it for free..?
- Ouais. Tu me fais vraiment pitié…

Oui, c’était complètement louche. Il ne manquait plus que l’homme – il avait dix-neuf ans, il n’était plus un enfant, plus un garçon, mais un homme – porte une pancarte proclamant son commerce de substances illicites! Mais Elijah avait vécu enfermé pendant treize ans. Il ne savait pas comment la sociabilisation fonctionnait. Il n’était pas capable de reconnaître le mal lorsqu’il ne venait pas torturer sa respiration. Il n’avait jamais vu de vilain aussi charmant.

- Tiens. Inspire.

Il obéit, mais il continuait de tousser. Ça n’avait pas effet, ce remède! C’était comme les autres… À quoi bon essayer… Tuer son espoir ainsi, ça ne faisait qu’être plus douloureux… À quoi bon espérer…

Il y eut une chute.

Oh.

Il se sentait inconscient, pourtant, il l’était, conscient. Sa souffrance devint euphorie. La nuit était le jour. All the grief is fun. All the rain is sun. Il était consumé par un grand feu, mais c’était chaleureux, et il ne brûlait pas sa peau. Non. Elle réduisait la douleur en cendres.

Ce fut le quatorze octobre 99 892, à treize ans, que Elijah connut le vrai bonheur pour la première fois.

L’homme le fit courir à travers les ruelles. L’asthme lui donnait l’impression de mieux respirer. Takoyaki. Défilé. Un peu de chant. Encore de la nourriture. Peut-être de l’alcool. Il n’aurait jamais autant apprécié cette soirée si on ne lui avait pas toujours interdit, non? Des couleurs. Rouge. Jaune. Orange. Bleu. C’étaient des costumes. Maquillage. Les gens étaient tellement beaux! Ça allait finir bientôt…Non! Non! Il ne voulait pas penser à ça. Quatre heures, lui dit le sylvestre. Il ne comprit pas. Il reprit du remède. Ah… Ça allait peut-être finir. Mais il allait revenir. Si Noël était tous les jours, on ne l’aimerait pas autant. Les gens étaient beaux. Il était beau, son sylvestre. Il était grand. Pas trop musclé. Mâchoire fine. Yeux en amandes. Blond vénitien. Il était beau. Et il embrassait bien. Elles étaient douces, ses mains. Elle enflammait chaque partie de sa peau. C’était bon. On ne l’avait jamais touché comme ça. Il se retrouva nu. Il ne se rappelait pas d’avoir été déshabillé. Il se sentit saigner. Mais ça ne faisait pas mal. Il perdait le souffle. Mais c’était merveilleux. Bon… tellement bon…  
Il se réveilla du rêve dans une chambre qu’il ne reconnaissait pas. Il lui semblait ne pas avoir vraiment vécu cette nuit. Le seul souvenir qu’il en gardait, c’était une joie à laquelle il ne parvenait plus à toucher. Le seul sentiment qu’il pouvait atteindre, c’était une nervosité grandissante face aux conséquences de son envolée.

- …Oh, crap…
- Qu’est-ce qu’il y a?
- Mes parents… They will be worried…

Il éclata en sanglots.

- T-t-they will force me back on that bed! I don’t want to!
- Woh… calme-toi. T’as pas à penser à ça, d’accord?

L’homme lui prit le visage à deux mains pour que leurs regards se croisent. Elijah y lit de la sympathie alors qu’il en avait rarement vu dans les yeux des autres.

-  Tu as passé une belle soirée hier?
- Y-yeah… I just… I want it again, so, so much…  
- Bien, c’est correct, on se reverra. Je t’en redonnerai, de mon truc. Tu vas peut-être passer une semaine de merde le reste du temps, mais quand on va se voir, ça va être bien. Ça te va?
- T-thank you… Y-yes…

Il se recoucha. Son corps lui faisait terriblement mal. Il ne lui avait jamais semblé que sa maladie était aussi accablante. Les murs de l’infirmerie se refermait sur lui pour créer un cauchemar claustrophobe. Mais il allait retrouver le paroxysme du bonheur. Pour ça, seulement, il pouvait avoir goût à la vie.

Quand il revint chez lui, ce fut sous les foudres de ses parents. Il tenta de leur expliquer qu’il s’était fait un ami, qu’il s’était amusé, qu’il n’avait pas eu mal, que cet ami, d’ailleurs, il avait le remède pour ses crises! Cependant, ils ne l’écoutèrent pas. Un ami? Et puis quoi, encore! On ne devient pas ami avec des pauvres! Mais ce n’était pas n’importe quel pauvre! Amusé? La vie au manoir n’était donc pas amusante? Ils travaillaient si durement pour qu’ils aient accès aux meilleurs romans, aux recueils les plus intéressants! Mais il était fatigué de vivre dans des livres... Surtout quand la majorité de son existence était la lecture de textes médicaux! Et quel genre de prolétaire parvenait à trouver une solution là aucun des meilleurs docteurs de Beandre n’avait réussi? C’était un bon bourgeois! Ça devait être là qu’il trouvait ses soins! Il était si gentil…

Il s’appelait Miraj. Ce qu’il lui avait promis, il lui offrit. Ils avaient leurs rendez-vous hebdomadaires, d’abord, qui devinrent plus fréquents avec le temps. Ils se shootaient – Elijah était passé aux seringues, Miraj lui avait vanté la vitesse à laquelle le produit faisait effet par ce moyen – faisaient l’amour, se baladaient en ville ou en forêt. Parfois, Elijah disparaissait pendant des semaines avant de revenir au manoir. Sa réputation était souillée. Son moral, plus bas qu’il ne l’avait jamais été quand il n’était pas au plus haut qu’il n’avait jamais connu.

Le bonheur a pourtant toujours un prix. Et ça ne pouvait pas juste être la dépendance accrue qu’il avait développée à ses quelques heures de joie.

- We don't need trash like this here!!

Ni les insultes des cousins qui ne l’avaient jamais connu.

- Hey, I'm not the one who said it, but I've heard that he slept with him just to get filthy drugs...


Ni son malheur lorsque le feu ne brûlait pas ses veines.

- SCANDALOUS!!

Ni la réalisation que son sauveur ne l’avait jamais vraiment aimé.

- Elijah… Non. Je ne peux pas rester avec toi… C’est.. trop demandé… Je ne veux vraiment pas que ça se sache…
- Miraj..! Please… you can’t leave me alone… I.. I need it… I need you…
- WHAT’S THE POINT OF FUCKING A 14 YEAR-OLD BOY IF HE CAN GET PREGNANT?!

Il était enceinte.  

- I'VE HEARD that his parents didn't even want him to abort!

Il voulut un avortement. Il n’avait que quatorze ans! Il ne pouvait pas élever un enfant! Il était malade, paralysé, incapable de faire vivre une vie si fragile quand il ne pouvait même respirer lui-même! Il n’avait jamais voulu être né. Il ne voulait pas condamner quelqu’un d’autre à la vie.

- M-mom… I just… I just need some money… for the abortion, that’s all…

Elle secoua la tête. Mais c’était un refus plus grave encore.

- D-dad…please…
- You’ve made a mistake, Elijah, you need to learn from it. Not everything can always go your way.
- NOTHING EVER WENT MY WAY! My life is nothing but
pain! I just… I wanted.. for once… I wanted to have something, for once.. to be able to live. But I wasn’t born to live, wasn’t I?

Parce qu’ils ne se contentèrent pas de le punir par telle damnation : ils l’abandonnèrent à cette vie à laquelle il avait tant aspirée. Tu voulais ta liberté, tu voulais l’amour, et voilà. Si tu avais accepté de survivre sous cage de verre, tu aurais été sauvé. Il n’était pas né pour vivre.

- I-it’s fine, baby… We’ll do this, together. You’ll see, we’ll get over this.

Si je ne peux pas t’éviter l’enfer, alors j’essaierais d’y feindre un paradis.

Il lâcha la drogue : d’abord, il ne voulait pas que son bébé soit maudit comme il l’était. Ensuite, il ne connaissait pas de fournisseur autre que Miraj, qui semblait avoir complètement disparu. Il dût vendre les vêtements qu’il avait sur le dos pour être capable de se payer un appartement raisonnable. Mais heureusement, il trouva du travail rapidement. Ses manières nobles, sa politesse royale et sa détermination plaisaient définitivement aux employeurs. Quoique, il finit par être renvoyé à deux endroits… Il faut croire que les crises d’asthme, devant des clients, ça ne plaisait à personne. Surtout lorsqu’elles étaient aussi fréquentes que les siennes. La deuxième fois, ce fut sa grossesse : il paraissait jeune, trop jeune pour avoir un enfant. On ne voulait pas de mauvais nom au commerce!

Ceux qui acceptèrent finalement de le garder étaient une manufacture de bijoutiers qui avaient besoin d’un assistant pour accueillir les clients et nettoyer l’atelier. Deux des artisanes employées, Wanda et Masha, étaient mariées depuis près d’un siècle et prirent le jeune doll en affection. Ce fut peut-être leur amour pour lui qui lui permit de conserver son poste. Mais il travaillait fort, tous les jours, il dormait parfois même sur place lorsqu’il finissait trop tard!

D’ailleurs, ce fut dans l’atelier qu’il accoucha…

- WANDA! Va chercher les bassines, vite!
- MASHA! Tu vois pas que je suis occupée?! J’ai les mains entre ses jambes, oui!
- I-it hurts so much! gémissait-il.
- Bien, oui, ça fait mal! C’était quoi l’idée de commencer les contractions ici!
- I didn’t choose it, yes! se défendit-il avant de hurler sa douleur.
- Bon, j’ai les bassines, là… qu’est-ce que tu fais?
- JE FAIS ACCOUCHER ELIJAH! Qu’est-ce que tu penses que je fais!
- Oh wow… regarde ses cheveux…

Une dernière poussée et le petit trésor était né. C’était bizarre de se dire qu’il y avait une moins grande différence d’âge entre son bébé et lui qu’entre son père et sa mère. C’est terriblement laid, des bébés, à la naissance. Le sien ne faisait pas exception. Un bébé naissant, c’est bleu – le sien avait d’ailleurs une tignasse rousse qui contrastait affreusement avec cette peau impossible –, ça a des rides partout, ça crie et ça te prévient, comme dernière misère après la douleur de l’accouchement, que la paternité n’a rien d’agréable. Pourtant, Elijah, quand il tenait ce petit monstre contre son torse, il ne put s’empêcher d’être consumé par une vague d’amour. Il ne pensait pas au labeur à venir. Il ne pensait plus à ses crises qui n’en finiraient jamais. Il pensait seulement à la vie qui venait de sortir de lui. Il pleurait, mais il était heureux. C’est peut-être ça, être parent… Aimer inconditionnellement, malgré l’infortune, la tristesse et la douleur. Malgré tout.

Son enfant, elle s’appelait Charlie.

Sa naissance rendit les choses beaucoup plus compliquées. En plus de travailler pour se loger, se nourrir, s’habiller et vivre, il devait ramener des fonds pour une gardienne – quoique, il tentait généralement de l’amener à l’atelier quand il n’y avait que Masha et Wanda, les seules acceptaient de l’aider un peu avec sa puce lors de leurs heures de travail – des vêtements pour une fillette à qui plus rien ne faisait au bout de deux semaines, des couches, et... oui, éventuellement, de la nourriture. Bien heureusement, le corps d’un doll, en plus d’être propice à la grossesse d’un mâle, avait les mêmes capacités d’allaitement qu’une femme. Non, il n’avait jamais eu de vrais seins, mais oui, ses pectoraux étaient légèrement plus gonflés. Seulement quand il était nu, ça paraissait un peu. Mais il devait quand même acheter des substituts à sa fille. Il ne voulait pas l’empoisonner.

Parce que Elijah, sans sa grossesse, n’avait plus que la barrière de l’ignorance qui l’empêchait de se fournir en drogue. Il n’avait pas appris, en neuf mois, à accepter ses crises. Il n’avait rien non plus, qu’elles. La chambre d’infirmerie s’était reconvertie en l’atelier poussiéreux qui était devenu allié à son malheur. Les attaques étaient évidemment plus fréquentes que dans le manoir synthétisé des Myzzrim. Masha et Wanda, aussi gentilles étaient-elles, ne suffisaient pas à calmer sa douleur. S’il les avait connues plus tôt, auraient-elles pu lui permettre de lui donner assez de bonheur en amitié pour que le parasite devienne impuissant? Sûrement. Mais il avait déjà connu la joie extrême. Et, à chaque fois que le prédater parvenait à le capturer pour le dévorer vivant, la voix en lui criait : « Tu n’as pas à vivre, ça, Elijah! Tu n’as plus à vivre ça! Ça fait mal, non?! Ça pourrait ne pas faire mal! Tu vaux mieux que ça, tu peux te sauver! Qu’est-ce qui te prends! » Alors, quand la morale n’était plus là pour inhiber son besoin, il trouva un nouveau fournisseur et s’y remit.

Il connut, pour la première fois, le prix astronomique de sa consommation. Il ne pouvait pas se permettre ça en plus de toutes ses autres dépenses. Il le voulait gratuitement. Mais il n’avait plus rien à donner! À part son corps… on lui avait toujours dit qu’il était joli, et puis, n’était-ce pas ce qu’il faisait avec Miraj? Parce que Miraj ne l’avait jamais aimé. Il s’était déjà vendu pour se sauver. Il commença donc à donner des fellations à son fournisseur, mais les récompenses étaient trop maigres, alors il le laissa le posséder complètement. Quelques minutes d’horreur pour des heures de plaisir. Cette fois, il se protégeait. Il ne voulait pas d’une autre erreur.

À quinze ans, Elijah était père célibataire, travailleur à temps plus que plein, assez malade pour que l’infection elle-même suffise à rendre fou, presque prostitué. Les injections, elles étaient son seul moment de repos. Loin d’être son seul moment de bonheur. Charlie n’était que joie, mais elle était épuisante. Heureusement, il ne s’intoxiquait que lors des crises qu’il avait à domicile, quand Charlie dormait. Enfin, ça aurait été une bonne chose si elles n’étaient pas aussi fréquentes.

Si fréquentes, oui, qu’il ne fut pas surprenant que les premiers mots de Charlie aient été débités alors que l’asthme le dévorait. Entre deux souffles prononcés, elle saisit son chandail, le regardant avec ses orbes de pureté céleste, et murmura un « Papa… » inquiet. La chaleur amoureuse qui le posséda lui fit réaliser une chose cruciale.  Il n’avait pas besoin d’un remède, quand elle le regardait avec toute l’affection d’une enfant qui ne comprenait pas que son papa était différent, trop jeune, misérable. Il n’avait pas besoin d’un remède. Il avait juste besoin d’elle. C’était la nuit, quand il était privé de sa présence, qu’il nécessitait la douceur factice de ses injections. La douceur de Charlie, elle, elle était bien réelle.

À quinze ans, Elijah travaillait à temps plein, subissait les assauts de son mal chronique, s’injectait à une drogue qui le tuait plus que sa maladie, se prostituait pour le poison. Mais il était père. Ça rendait son existence merveilleusement douloureuse.

À chaque année, il gagnait en maturité et en responsabilité. L’argent qu’il s’était autrefois mis de côté pour s’acheter des vêtements ou de la nourriture spécialisée, il allait dans la future éducation de son ange. Parfois, il se permettait de lui acheter des livres, des poupées, même si, rapidement, Charlie s’intéressa plus aux épées en bois ou aux petits soldats que Papa faisait avec un peu de magie et les résidus métalliques de l’atelier.

- Papa, c’est un artisse!
- On dit artiste, se moquait-il.  Et non, Papa n’est pas un artiste. C’est juste pour toi, les petits soldats. Tu les aimes?
- Oui! – c’était effectivement ses jouets préférés – Je peux avoir un cheval? Pis un chien? Ou un ange, papa? Comme les gentils Fergail?
- Les gentils Fergail?
- Les gentils monsieurs qui s’occupent de la ville!
- Qui t’a parlé d’eux?
- Wanda!
- Bon, Papa peut pas te faire un ange… Papa sait pas comment faire, mais je vais te faire une licorne.

C’est pas super compliqué, une licorne. C’est juste un cheval avec un truc pointu soudé au front.

- Oui! Une licorne!

Mais bon, ça suffisait à faire rêver les enfants.

Quand elle ne replaçait pas avec précautions ses petites figurines cousues de métal bâtard, elle courrait dans l’appartement, au grand désarroi des locataires du logis du dessous, son épée à la main en feignant combattre des monstres invisibles.

À six ans, elle apprit d’Elijah que les grands chevaliers et mages allaient à l’Académie. Elle lui déclara alors :

- Je vais aller là-bas, je vais devenir un prince et tu vas être ma princesse!

Ce fut peu après qu’il l’inscrit à l’école. Elle se montra extrêmement intelligente. Elle apprit à lire à une vitesse incroyable. Elle ne voulait que ça, apprendre! Elle revenait sans cesse à la maison, à chanter la leçon de la journée, croyant enseigner une nouveauté à son papa qui n’avait pas, contrairement aux autres papas, eut le temps d’oublié les enseignements de son tuteur pour réellement se surprendre de cette instruction primaire. Elle était merveilleuse, et innocente, surtout lorsqu’elle le regardait et demandait :

- Papa, pourquoi la maîtresse pense que tu es mon frère?

Parce que j’ai vingt ans, mon cœur, et que ça paraît, même si j’ai les yeux et l’âme d’un homme qui en a vécu cinquante.  

- Pourquoi ils croient que tu as l’air malade?

Parce que je le suis, et que le médicament que j’enfonce dans mes veines, il me rend plus souffrant encore.

- Pourquoi les papas et les mamans des autres disent que tu devrais pas être mon papa…

Parce qu’ils le voient, à mes bras couverts de trous, que je suis un sale junkie et que je suis plus dangereux pour toi que tous ceux qui n’auraient même pas le droit de t’approcher.

Il était dangereux pour son bébé, Elijah, mais il prenait des précautions. Le soir, quand la douleur des crises devenait trop aiguë pour que la voix angélique de son amour le sauve, il lui soufflait doucement :

- L-Love, it’s time to go to bed, alright?

Charlie eut un puissant hochement de tête, extrêmement sérieux – complètement adorable – avant de se réfugier dans sa chambre, qu’elle verrouilla. Papa lui avait même indiqué de glisser la chaise sous la poignée de porte. Il n’y avait que deux chaises dans toute la maison, et il devait constamment ramener celle-là à la cuisine lorsqu’ils mangeaient, mais Elijah préférait l’astreindre à cette pièce plutôt que sa précieuse fille, sa petite protégée, puisse être vulnérable alors qu’il…

Diluer le stupéfiant avec l’acide.

De l’eau stérile.

Ébullition.   

Désinfection, légère.

Il commençait déjà à perdre le souffle.

Garrot.

Seringue.

Relâcher le garrot.

Et on enfonce…

Enfin…

 Plus de douleur, plus jamais…

Le feu.  

Tu ne survivras pas sans moi, Elijah.

À leurs yeux, il était un père indigne qui avait donné naissance à une merveille.

Parce que, Charlie, elle était fantastique. Souvent, les parents, quand ils regardent leurs enfants, ils pensent qu’ils sont les plus beaux, les plus grands, les plus intelligents, et souvent, ce n’est pas justifié. L’amour rend aveugle. La seule chose que l’amour aveuglait chez Elijah, c’était la souffrance. Charlie était réellement fantastique. La beauté, c’était subjectif, et en taille, elle était objectivement moyenne. Mais en intelligence… Elle était formidable. Elle avait quelques facilités, mais sa force majoritaire provenait de son désir insatiable d’apprentissage. Ainsi, peut-être ne se démarquait-elle pas aux premières années d’école, à dix ans, cependant, elle était tête de classe et multipliait les reconnaissances. Elle n’avait pas beaucoup d’amis – elle passait son temps à étudier et à lire les livres que son Papa lui achetait – mais elle ne désirait pas la compagnie humaine. Elle n’avait qu’un objectif.  

Les rêves un peu ridicules et enfantins où elle embarquait son père sur un cheval blanc commencèrent à se concrétiser quand, à 15 ans, elle fut finalement admise comme étudiante à l’Académie. Son potentiel était alchimiste : elle avait monté un recueil complet de potions liées à la santé et la construction chimique du corps. Certes, elle était dans la moyenne des jeunes académiciens, mais Elijah restait fier. Il l’adorait comme si elle avait du sang divin.

Elle avait quinze ans et planifiait déjà faire vivre son père à son dépend! Avec la pension qu’elle recevait pour lui permettre d’étudier, elle offrit à son père une maison. C’était effectivement la maison d’Elijah, et non la sienne. Charlie n’y était jamais. Études. Stages, souvent – elle pouvait partir des mois – et, éventuellement, ses premiers amis et amours.

C’était comme si la nuit ne finissait pas.

Il aurait dû être heureux pour le succès de sa fille. Il aurait vraiment dû. Quel genre de père indigne ne pouvait pas se contenter du sourire de son enfant? Ils avaient tous eu raison. Ils avaient toujours raison. Il était dangereux pour son ange. Égoïste. Quel genre de monstrueux parent désirait trop consciemment pour qu’on blâme l’inconscient garder son bébé à ses côtés, pour toujours? Comment pouvait-il pleurer son absence alors que celle-ci signifiait son avenir brillant!

La maison était trop vide sans Charlie pour la combler. Et quand il ne respirait plus, il lui semblait que seule sa fille pourrait lui redonner le souffle. Il pleurait tellement, que même lorsque l’asthme terminait, les sanglots qui le secouaient paraissaient comme une continuité éternelle de la crise.

Il commença à régulièrement manquer au travail, car il était physiquement et mentalement incapable de s’y présenter. Il finit par être renvoyé, mais comme il n’y allait plus, il n’eut jamais de réelle confirmation. Son seul bonheur disparu, Elijah tomba tel il n’était jamais tombé. C’était pire qu’avec Miraj, car il n’était même pas heureux. Il se shootait pour être comateux. Devenir cendres immobiles. Ses journées se résumait à tenter de survivre jusqu’à ce que la prochaine dose de son ange arrive. La première fois qu’elle revint et le vit, maigre d’avoir réduit ses dépenses à sa drogue, les bras troués comme les vieux chandails qu’il portait, les yeux fatigués de ses nuits sans sommeil, elle courut à lui et le serra contre elle, pleurant son inquiétude. Peut-être réalisa-t-elle ce jour-là que son père était un junkie. Peut-être le savait-elle déjà, mais elle n’avait définitivement jamais constaté les conséquences.

 Ce qui était certain, c’est que, dès ce jour-là, elle imita celui qui l’avait portée des années auparavant et prit des responsabilités trop grandes pour son jeune âge. Elle décida qu’elle voulait sortir son père de sa misère. Lorsqu’elle n’était pas à la maison, elle l’appelait pour s’assurer de son état. Quand il ne répondait pas, elle allait le chercher dans le fond des ruelles où il se perdait, délirant. D’ailleurs, à dix-huit ans, quand elle se trouva un fiancé, elle fut ferme envers lui et refusa que leur vie de couple exclue Elijah :  

- On est en train d’économiser pour s’acheter une maison à la campagne. Pour Terry, moi et toi, Papa.

Pour lui aussi? Il ne méritait pas cela. Mais ça réchauffait son cœur que son ange ait pensé à lui comme ça.

- Bien voyons, imbécile! C’est sûr que je te veux avec nous. Pis Terrence t’adore, ça le dérange pas, d’accord?

Il l’aimait tellement. Sa petite fille parfaite. Son trésor…

- Je t’aime, Papa. Papa? Ne pleure pas, franchement, tu es pire que moi!

Pourquoi avait-il fallu qu’elle veuille autant le sauver? Elle aurait dû l’abandonner. Il ne la méritait pas. Il était un junkie, malade, trop jeune pour être son papa. Elle aurait dû le haïr pour ce qu’il était. Pour ces heures qu’il aurait pu passer avec elle au lieu de se prostituer. Pour cette dépendance qui l’empêchait de répondre correctement à ses appels nocturnes. Pour cette chaise qui barrait la porte. Pour toute l’horreur de cette enfance qui n’était pas à la hauteur de l’enfant qu’il aimait tant. Pour toute l’horreur qu’il lui ferait encore vivre.

Il ne sait même pas comment c’est arrivé.

Il se rappelle seulement de la flamme chaleureuse qui se répandait dans ses veines.

Et de l’odeur de chair brûlée qui lui monta au nez lorsqu’il regarda ses mains noircies.

Lorsqu’il leva les yeux vers sa maison, elle était plus noire encore que ses chairs brûlées.

Il vous racontera qu’il a eu un bad trip. Que sa fille l’a appelé. Qu’elle était morte d’inquiétude à l’idée d’une overdose. Il vous dira qu’il était tellement loin qu’il l’aurait frappée. Qu’il a mis le feu à sa propre masure et que ses mains ont été léchées par la brûlure. Il vous contera qu’elle a été amenée à l’hôpital et, lui, justement laissé là, inconscient. Mais tout ça, c’est fictif. La réalité, c’est que Elijah ne sait pas. Que personne ne le sait.

 Quand il se réveilla du cauchemar dont il n’avait même pas souvenir d’être entré, ce ne fut qu’avec une immense douleur jusqu’aux coudes et un cri de détresse qui retentissait dans son crâne. Quelque chose d’affreux était arrivé. Personne ne le savait.

Il se rendit à l’hôpital pour ses propres blessures, mais, dès qu’il donna son nom, il fut accosté par nombre de docteurs. Il prit un moment à comprendre les intentions et les paroles de ceux-ci. Liste de personnes à contacter en cas d’accident… Charlie Myzzrim… Un incendie atroce… Besoins de fonds pour payer les opérations… Charlie? Son ange?! Qu’est-ce qui était arrivé à son cœur?!  Un incendie..? Il pensa à sa maison. Il avait compris, mais sans les regrets et la faute qui s’écroulaient sur lui, il ne réalisait pas vraiment.

Il se précipita vers la chambre qu’on lui avait indiquée. L’asthme lui remontait à la gorge. Ses mains crispées de souffrance ne faisaient que souligner l’emprise du cruel prédateur sur lui. Plus il courrait, plus il le rattrapait. Mais une douleur plus grande commençait à s’emparer de lui.

Il ouvrit la porte de la salle.

Ils devaient être une quinzaine autour d’un lit. Ils courraient. Ils criaient des ordres. Il y avait une panique professionnelle dans la chambre. À travers tous les cris s’en éleva un plus puissant encore. Ce n’était pas un cri humain. C’était le cri de la mort et de la douleur. Quand Elijah laissa son regard glisser vers l’objet d’intérêt de tous les médecins, son cœur arrêta de battre.

Il referma la porte.

Ses yeux s’arrêtèrent à ses mains. Elles étaient noires. Moins noires que la maison. Moins noires que la chair étirée contre le crâne de sa fille alors que de sa gorge s’étouffait un cri animal.

Il n’eut jamais à revoir cette vision, car ils étaient bons, les docteurs, à réparer l’irréparable. Mais Elijah ne le sut pas avant longtemps. Il savait que c’était de sa faute si sa fille était morte. Il ne voulait plus retourner à l’hôpital. Il ne voulait plus revoir la preuve de sa culpabilité.

Il refusa de reprendre de la drogue. C’était sa faiblesse qui était à blâmer dans cette affaire. C’est facile, refuser. Ce qui est difficile, c’est tenir le refus, surtout lorsque notre dernier bonheur avait définitivement disparu. Il refusa à cinq reprises. À quatre reprises, il y retourna. Il n’arrivait personne pour l’arrêter. Il se shootait pour oublier. Oublier quoi? Qu’il avait honte. Honte de quoi? Honte de se shooter. Ce n’était que sa propre volonté qu’il cesserait.

Ce fut un matin de mai, presque un an après l’accident, au réveil d’un cauchemar trop doux, qu’il trouva finalement la force de vaincre la tentation. Ce matin-là, il avait le souvenir trop vivant d’une petite Charlie dans son esprit.  

Papa, je peux avoir un ange?

Papa peut pas te faire un ange… Papa sait pas comment faire…

Il entra dans l’atelier de bijoux. C’était un dimanche. Tout était fermé. On l’avait renvoyé, certes, on ne lui avait jamais repris ses clés. Il entra donc dans la bijouterie sans réel problème. Il chercha des résidus de métal. Il devait faire un ange à son bébé. Elle en voulait un… Il lui ferait un ange et l’amènerait à l’hôpital. Ou à sa tombe. Pour que quelqu’un veille sur elle.

Charlie aimait le métal. Elle aimait quand il y avait des pierres accrochées, aussi. L’améthyste, c’était sa préférée. Sa licorne, elle avait la corne violette. Il fallait que l’ange soit en améthyste. Peut-être pas tout. Mais en partie. Il fallait que l’ange ait de grandes ailes. Il fallait qu’il ait quatre bras, comme les titans, car elle ne méritait pas moins. Il fallait qu’il soit grand, oui, absolument grandiose. Il fallait qu’il la protège. Il fallait qu’il soit parfait. Comme elle. Moins que parfait, ça n’allait pas. Il fallait que Elijah donne naissance à la perfection à nouveau.

Il tomba à genoux.

Elijah ne savait pas faire d’anges. Il ne sait toujours pas aujourd’hui. Une vision angélique unique, c’est presque impossible. Il faut un modèle. Personne ne sait reproduire la créativité de la mère blanche.

Mais il l’avait fait.

Ce matin de mai là, Elijah avait fait de ses mains un immense ange d’améthyste et d’argent pur.

C’était Charlie si elle avait été née sous l’étoile Fergail.

Il en pleura de bonheur.

Après ce matin-là, Elijah ne retoucha plus jamais à la drogue, aux médicaments, et même à l’alcool.

Regarde ton papa, mon cœur. Il est devenu un artiste.

Quand il revint finalement à l’hôpital pour connaître le verdict à l’état de sa fille, il apprit qu’elle avait été transférée à une institue pour comateux et mentalement instables. Il ne savait pas s’il serait plus soulagé à la première option ou la seconde. Il ne savait pas s’il devait être plus soulagé lorsqu’il fut présenté à la première.  

Au début, il croisait Terrence, le fiancé de Charlie, dans les corridors. Il ne lui offrait qu’un regard vide, répondu par des yeux noyés de haine. Bien sûr que c’était de sa faute. Il n’allait pas mentir. Il l’acceptait. Terrence finit cependant par disparaître.

Rapidement, il devint plus connu à l’établissement que l’enfant qu’il y visitait. Ce n’était pas surprenant : il tenait à visiter les malades sans famille, prêtant ses talents de sculpteurs pour créer des jouets merveilleux à ses enfants dans des corps d’adultes. Il poussa même sa bonté plus loin en recherchant sur les différentes virtus des pierres et trouvant des talismans qui calmaient les tourments des déments. Hors de l’institut, il utilisait ces dons pour calmer des junkies comme il avait été et tenter de leur donner une autre solution à leur souffrance. Les infirmières l’appréciaient beaucoup, au point où elles lui demandèrent aide.

- Il s’appelle Kovu, expliqua l’aînée. C’est tout ce qu’on sait de lui. D’après sa taille, il a dix ans.

Dix ans… Comme c’était jeune. Qui abandonnerait un enfant si jeune? Qui serait assez cruel pour qu’il se retrouve dans un pareil repère de solitude?  

Kovu était un python birman qu’on gardait dans une chambre séparée des autres internés. Il faisait quatre mètres de long, ce qui était en effet la taille normale d’un serpent de son âge. On lui expliqua que Kovu n’avait pas pris forme humaine depuis son arrivée. On savait qu’il était conscient, car un membre du personnel animalier l’avait entendu se présenter. Dès lors, Kovu n’avait pas reparlé.

Quand Elijah croisa son regard, il ne vit pas les yeux d’un enfant de dix ans.

- On ne sait pas ce qui lui est arrivé, mais il est traumatisé.

Peut-être avait-il été forcé à vieillir comme lui avait été.

- On se demandait si tu pouvais prendre soins de lui.

Kovu avait les yeux de l’adolescent qu’il avait été.

- Oui, bien sûr.

Et de l’adulte qui avait commis une faute irréparable.

On le laissa seul avec lui.

On ne sait pas ce qui lui est arrivé.

Non. Ce n’était pas ça. On ne sait pas ce qu’il a fait. Oui. C’était plus approprié.

Elijah s’assit devant lui.

- Kovu, c’est ça?

Le serpent resta roulé contre lui-même, mais il le fixait toujours, fatigué.

- Peut-être je me trompe, mais… Est-ce que tu te sentirais coupable?

Kovu bougea. Il était alerte. Elijah savait qu’il avait visé juste.

- Tu sais, Kovu, moi aussi je suis coupable. J’ai promis à ma fille que je lui donnerais une vie merveilleuse, mais je n’ai pas réussi, et à la fin, je l’ai… je l’ai tuée. J’ai commis un infanticide sur mon propre enfant. Je suis plus coupable et monstrueux que personne qui n’existe sur cette planète. Mais, vois-tu, Kovu, être coupable, ce n’est pas se morfondre dans sa douleur. Être coupable, ça vient avec des responsabilités. On doit se pardonner, sans jamais oublier.

Il détacha ses bandages qui couvraient ses bras et lui montra ses grandes plaies noires.

- Jamais oublier. Parce qu’on a une faute à payer. Et la seule façon de payer, c’est de travailler pour que plus personne ne commette l’erreur qu’on a commise. Je vais laisser le monde dans un meilleur état que quand j’y suis arrivé.

Le serpent s’approcha, incertain. Elijah lui sourit et tendit son bras pour caresser sa tête.

- Si nous devons vivre en enfer, alors j’essaierais d’y créer un paradis.

∞ Aspect social

Elijah a été rejeté par les Myzzrim, mais il a maintenant un statut social assez important. En effet, il est excellent sculpteur et beaucoup de nobles lui passent des commandes. Sa situation financière est donc très bonne. Il vit dans une maison qui lui sert aussi de boutique, où il vent sculptures, talismans, cristaux magiques et... dildos, oui. Il y vit seul avec son serpent Kovu. Il n'a pas beaucoup d'amis, car il est très occupé, mais il a quelques amants qui viennent et s'en vont et s'entend bien avec Mars Donockley. Sa fille est toujours vivante, mais comateuse, et il va la visiter à toutes les semaines, en plus de s'occuper des autres patients de l'institue et de rendre visite à des centres de désintoxication ou des écoles pour faire de la prévention contre la drogue, chose qui le répugne complètement. Il parle l'angélique et le sylvestre. Concernant les dragons, Elijah est très occupé avec ses problèmes personnels et n'y pense donc pas beaucoup. Comme il vit à l'extérieur de la ville, les tremblements de terre ne sont pas aussi grands que dans Argos même et toute cette situation lui paraît peu alarmante. Quelqu'un finira pas trouver une solution, mais ça ne sera pas lui.


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Elijah
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MessageSujet: Re: Asphyxie Asphyxie EmptyLun 14 Mai - 9:32
Rune
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MessageSujet: Re: Asphyxie Asphyxie EmptyLun 14 Mai - 15:34
Azran
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Azran
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MessageSujet: Re: Asphyxie Asphyxie Empty
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Asphyxie
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